Posté par SEILLERY Le 6 avril 2009 à 13:48
Mon premier marathon à 38 ans et avec 4 mois « d’entrainement « .
Une promesse faite à mon fils Antoine (6 ans 1/2) qui a vu un de mes amis, Rémi (champion de France de boxe) l’an dernier réaliser cette course aisément.
Un défi réalisé pour mon fils, pour moi…
Merci à ceux qui m’ont accompagné avant (à toi Caroline), pendant (Capitaine St Cyrien Garrivet), après (mes parents, ma famille, mes proches, mes amis…).
Tous deviennent source de réussite.
Sans eux l’enfer des 7 derniers kms (les jambes ne fonctionnent plus, les pieds rasent le sol en butant sur le moindre défaut de l’asphalte, les débuts de crampes, les douleurs aux hanches, les chevilles gonflées, les pieds en feu, même les bras deviennent lourds, les larmes…)-37 kms-.
Je craque, les nerfs lâchent, la pression s’en va, elle m’abandonne pour me laisser face à moi-même, face à mes faiblesses et mes carences, mes lacunes physiques.
Le souffle est là, le cœur y est aussi, l’envie, la rage aussi sont présentes : je ne céderai pas !
J’irai au bout, à l’arrivée où mon fils m’attend, à nouveau les pleurs, la peur de le décevoir, de les décevoir, de me décevoir.
Je ne suis pas » comme un pilote en son navire » (Descartes), j’ai beau ordonner à mes jambes, commander par l’esprit à mes pieds de se lever… rien n’y fait : je n’avance plus-37.5 kms-.
Dualité de l’âme et du corps si chère à Platon.
Son maître à penser est là en moi, il m’anime : plutôt mourir que de céder au mensonge. La Vérité (de soi), le vrai (sur soi), seul cela compte.
Qui suis-je ? Où vais-je ?
Le marathon, ce dépassement de soi que l’on s’impose, repousser les limites de ce que l’on sait de soi, nous rapproche de cette réponse-38 kms-.
J’ai l’impression de faire du sur-place tant, ceux qui étaient derrière moi jusqu’alors, me dépassent.
Etat second, je ferme les yeux pour ne pas voir que le décor ne défile plus, je « m’endors » pour oublier que je souffre, il ne faut pas, plus s’écouter, ne plus penser, se mettre en mode automatique, pas à pas, avancer…-38.5 kms-
Ne plus penser en km cela fait longtemps d’ailleurs que je calcule en 100aine de mètres.
Maintenant, j’ai l’impression que mes foulées sont minuscules, ce sont des pas, marche-je ? Mon avancée se calcule en centimètres !
Combien de temps mettrai-je 30 cms par cms ? -38.8 kms-
Vais-je y parvenir ? Je sens la crampe au mollet gauche qui arrive. Il me faut l’éviter sinon tout est compromis.
J’étais inscrit chez les vert : 4h00 pour finir. Au km 21.1 en 2H10, au 30 km 3H02, j’étais encore dans les temps il y a 7 à 8 kms. Maintenant, je suis dans l’étang en train de me noyer. J’ai mal, je frissonne, je n’entends plus la foule qui nous encourage. Je suis en moi, dans mes entrailles, avec mes tripes, à l’intérieur. Il faut sortir de là sinon… mon corps m’envahira, parlera à ma tête et prendra le dessus, il ne faut surtout pas !!! -39 km-
Penser, vite, penser à autre chose, s’occuper l’esprit. Se concentrer sur le souffle, le soleil qui me chauffe le dos, sur mon objectif : finir, en finir. -39.2 kms-
Penser à mon fils Antoine qui m’attend depuis ce matin 9H00, que j’ai fait lever ce dimanche matin à 6H30 pour m’accompagner.
Penser à Caroline qui m’a accompagné en vélo sur pratiquement toutes mes sorties cet hiver (qui pleuve, qu’il neige ou gèle) jusqu’à 1H30 du matin une fois ! -40 kms-
Mes parents qui me suivent par sms et ma puce dans la chaussure, mes proches à qui j’en ai parlé, mes collègues qui sont venus et que j’ai aperçu sur le parcours, les autres qui m’attendent lundi pour en discuter.
Je ne peux pas les décevoir. Je ne peux plus maintenant renoncer, céder. -41 kms-
Se dire, que je souffrirai plus et plus longtemps encore de ma déception de les décevoir que de cette souffrance actuelle et » passagère « . -41.5 kms-
Penser à tous ceux contre qui je le fais. Tous ceux qui ont douté, s’attendent à ce que je n’y arrive pas, ceux pour qui c’est normal puisque… Ceux qui ont déjà préparé les petits mots réconfortant près l’échec, ceux qui doutent de vous, ceux qui vous freinent. Contre ceux dont les excuses, les prétextes, les conseils de ne pas faire comme ci, ceux qui n’auraient pas fait comme ça, comme toi, comme nous, comme moi…
Ceux qui doutent pour vous, de vous, pire; ceux qui pourraient vous faire douter !
En effet, le Marathon est un défi que l’on se lance, pour certains, et que l’on s’impose contre d’autres, contre soi… -42 kms-
Un rond-point, une place pleine de monde, j’entends à nouveau les encouragements, je revois la lumière, je sens les rayons du soleil… Je pleure parce que je sais maintenant que je vais y arriver.
Je retiens mes larmes, je veux faire bonne figure.
Non, en fait, je ne veux pas que mon fils me vois pleurer car je ne souhaite pas qu’il pense que le sport est uniquement une souffrance, je veux qu’il l’associe à une communion, à une fête, à un grand moment de joie partagée.
Oubliées les douleurs. Je pense à mon fils, à Antoine, à cette médaille que je vais lui mettre autour du cou.
L’arche d’arrivée est là devant nous ! On l’a fait ! On y est ! me dit Harold (le Capitaine St Cyrien), on se prend la main, on franchit cette ligne, fiers de nous. -42 kms 195-
Dans les bras l’un de l’autre nous fondons en larmes comme des Hommes, des vrais (félicitations à tous : femmes, hommes, associations, âges et corpulences).
Un leçon de courage, d’humilité et d’HUMANITE !
Stéphane (dossard 38 936) : 4 H 25 mns.