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Comment construire un record olympique sur 5 et 10 kilomètres

Mathieu Reizer


 

Que ce soit clair, je ne vais pas vous révéler ici la solution miracle pour vous garantir la victoire lors de votre prochaine course, encore moins un record olympique. Mais je vais plutôt vous présenter une analyse des deux records olympiques réalisés à Pékin par Kenenisa Bekele, sur 5000m et 10000m.
Un nouveau système a en effet été mis en place sur la piste d’athlétisme du Nid d’Oiseau pour effectuer de nombreuses mesures. Les athlètes portaient tous une puce intégrée à leur dossard permettant de connaître les temps de passage exacts tous les 100m, alors qu’habituellement cela est fait tous les 400m (ou tous les kilomètres pour certains cross et courses hors stade). Les données collectées sont désormais disponibles pour toutes les séries (hommes et femmes) sur 800m, 1500m, 5000m, 10000m et 3000m steeple. J’ai donc voulu voir par curiosité le schéma de course pour les finales des 5000m et 10000m, en regardant de plus près les temps des athlètes médaillés.

Pour rappel, le classement du 5000m était :
– 1. 12’57″82 Bekele (Eth)
– 2. 13’02″80 Kipchoge (Ken)
– 3. 13’06″22 Soi (Ken)

Et le classement du 10000m :
– 1. 27’01″17 Bekele (Eth)
– 2. 27’02″77 Sihine (Eth)
– 3. 27’04″11 Kogo (Ken) & Masai (Ken)

En observant les temps cumulés intermédiaires, difficile de voir comment s’est courue la course. Par contre, les temps intermédiaires pris séparément, par tranche de 100m, permet de bien identifier les moments clés de ce genre de courses, comme le montrent les 2 graphiques ci-dessous.

Le départ est pris relativement vite, dans le but bien évidemment d’être bien placé dès le départ par rapport aux autres concurrents. Ceci est primordial pour une course sur piste, pour pouvoir prendre la corde dans les virages. Dans les courses hors stade, on constate également des départs assez rapides mais c’est bien moins marqué car les parcours tournent rarement toujours du même côté. Ensuite, comme pour récupérer de l’accélération brutale du départ, le rythme tombe un peu (environ pendant 1 tour sur ce 5000m et 2 tours sur le 10000m)
avant de s’accélérer à nouveau pour se stabiliser au tour de la vitesse moyenne de course : 15″55 au 100m sur 5000m et 16″21 au 100m sur 10000m.
Puis vient le moment décisif, le final, où chacun doit donner le peu d’énergie qu’il lui reste. Et c’est là que Bekele impressionne. En témoigne son dernier tour sur 5000m où il parcourt la ligne droite opposée en 13 secondes, prenant ainsi 1 et 2.3 secondes respectivement aux futurs second et troisième, et confirmant encore sa supériorité dans le dernier virage en 13.4 secondes, prenant encore 1.5 et 2.9 secondes à ses poursuivants. Et que dire de la fin de son 10000m, où il s’envole dans le dernier virage en 12.5 secondes (vitesse qu’il n’a même pas atteinte sur le 5000m !), distançant irrémédiablement ses adversaires.
Tenir un rythme élevé tout au long de la course, c’est déjà bien difficile. Alors pouvoir encore accélérer sur la fin pour s’imposer, c’est faire preuve d’une bonne gestion de course et surtout d’une excellente préparation.

Même loin des enjeux olympiques, sur une course locale ou internationale, sur 10, 15, 20 kilomètres ou plus, cette capacité à pouvoir tenir notre rythme ou même pouvoir accélérer à l’approche de la ligne d’arrivée est un atout qu’il ne faut pas négliger pour faire une performance. Mais pour y parvenir, il faut s’entrainer légèrement différemment, pour habituer son corps (et son mental) à ce type d’effort. Le plus simple à mettre en œuvre, lors d’une sortie à allure donnée, est de débuter sur un rythme plus lent que prévu (de 5 à 15 secondes au kilomètre), puis d’augmenter progressivement l’allure pour être au rythme prévu à mi-course et finir l’entrainement légèrement plus vite. Au final, la vitesse moyenne sera identique à un effort parfaitement constant mais votre corps sera mieux préparé à finir les courses dans de bonnes conditions.

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